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Jaz est le monologue d’une femme qui semble ne pas parler en son nom propre. C’est une pièce qui a pour thématique principale la question de la violence faite aux femmes et plus précisément du viol. Jaz est une fille seule qui vit dans une cité laissée à l’abandon avec ses WC collectifs bouchés que personne ne vient réparer. Au milieu de cette décrépitude, Jaz est un pilier qui ne rompt pas, jusqu’au jour où l’un de ses voisins, qui l’observait depuis un certain temps, la viole. Depuis ce traumatisme, sont balayées les questions du rapport à la beauté, à la culpabilité inhérente à ce genre d’agression et à l’identité. C’est tout le processus de résilience que l’on traverse dans cette pièce qui, par le jeu du mouvement poétique, aborde la question de la reconstruction de soi. Dans la forme, le choix par l’auteur d’une écriture versifiée avec une rythmique proche de celle du jazz met en exergue cette sensation d’un personnage à la pensée saccadée et sans cesse au bord de l’explosion.
« À l’image de la musique qu’elle personnifie, Jaz tente de s’extraire avec violence et de manière imprévisible, du vide, du chaos laissés par la perte. La parole y est libératrice, comme un souffle, nécessaire. Mais outre le questionnement sur la renaissance au chœur du chaos, cette pièce, comme un certain nombre de pièces de Koffi Kwahulé, questionne pour moi la place du dire au milieu de l’espace vide et de l’enfermement, au milieu du danger, au milieu du théâtre. Dire les maux, les dénoncer, en les exposant sans demi-mesure. Comme une catharsis. Il me tarde depuis plusieurs années d’expérimenter Jaz sur un plateau. »
Astrid Bayiha
D’abord
une note
puis une autre
note puis encore
une autre note
la même
comme on frappe à la porte une myriade de notes la même
se frottant les unes contre les autres comme pour se tenir
chaud une note de toutes les couleurs même de celle qui
fut abolie de
l’arc-en-ciel un
flot de notes la
même de tous les
son notes espiègles
turbulentes la même
se précipitant pour
arracher le secret du
silence explosant
souvent à peine
leur envol éclos
pour enfanter
d’autres notes la
même encore plus
imprévisibles
incandescentes
volcaniques et enfin
rythmer le Nom dont
on ne saura jamais la nommer.
Koffi Kwahulé
Astrid Bayiha et Swala Emati
Mise en scène